J’avais envie de danser dans la rue
Hier soir encore cela m’est arrivé, j’ai eu envie de danser dans la rue.
Tout comme ces personnes qui marchent, qui discutent, qui fredonnent, j’ai eu irrésistiblement et naturellement envie de danser.
C’est un sentiment presque indescriptible mais en même temps très fort, j’ai eu l’impression qu’autant que de respirer, j’avais besoin de danser.
Généralement (eh oui, ce n’était pas la première fois…), je marche avec de la musique dans les oreilles. Et cette musique me fait ressentir des émotions que j’ai envie d’exprimer grâce à mon corps. La marche ne suffit pas à exprimer ce que je ressens à ce moment-là.
Je vérifie que la rue n’est pas bondée, voire qu’il n’y a personne.
Puis je bouge mes bras, fais éventuellement quelques petits pas chassés, quelques petits pas de salsa, etc. selon l’humeur et la musique.
Si je m’écoutais totalement, c’est un grand jeté, de la samba, des pas immenses que je ferais.
Je sens alors que je suis tiraillée entre mon envie de m’exprimer totalement en dansant et le « publiquement correct », ce qu’on nous apprend depuis toujours, rester neutre dans l’espace public et ne pas se faire remarquer.
J’ai octroyé trop d’importance au regard de l’autre
J’ai eu le sentiment que je m’empêchais une fois de plus de danser par peur du regard de l’autre.
Plus globalement, je souhaitais me détacher du regard de l’autre. Je souhaitais réussir à me dire que peu importe ce regard, je pouvais m’exprimer comme je le voulais.
Qu’il soit critique, méchant, gentil, brutal, doux, ce regard ne devait plus m’empêcher d’agir ou me faire agir contrairement à mes valeurs.
Me détacher du regard de l’autre me paraissait alors le seul élément fondamental sur lequel je pouvais et devais travailler afin d’oser être pleinement moi-même.
Je me trompais.
C’est en passant par le développement personnel et en travaillant sur moi-même que je m’en suis rendu compte.
En effet, encore plus que me détacher du regard des autres, je devais m’interroger sur mon propre regard sur le monde et sur les autres.
Je me suis interrogée sur le regard que je portais moi-même sur les autres
C’est en regardant une fille se promener deux fois au Monoprix que j’ai compris l’importance de mon propre regard sur les autres, sur ma manière d’accepter le regard des autres.
De son côté, ce n’était pas la danse mais le chant. Cette fille était, ces deux fois-là, avec son casque sur les oreilles, en train de chanter.
Pas en train de fredonner, non. De chanter, très distinctement, très naturellement aussi.
Dans ces deux situations, j’ai alors eu deux sentiments contradictoires.
D’un côté, j’étais impressionnée qu’elle ose s’exprimer ainsi.
D’un autre côté, je me demandais ce qu’elle faisait et pourquoi elle le faisait dans un endroit public. Au plus profond de moi, je suis certaine d’avoir ressenti de la frustration en voyant qu’elle osait s’exprimer malgré le « publiquement correct » alors que de mon côté, je ne m’autorisais pas à le faire.
Ce n’était pas « conventionnel » et remettait en cause ma vision des choses. J’étais donc interloquée. J’ai ressenti cela en fonction de mon vécu et ai donc compris que nous avions tous un vécu, tous des émotions différentes.
Notre regard sur les autres ne dit pas qui ils sont et le regard des autres sur nous ne dit pas qui on est.
J’en ai conclu que le regard de l’autre nous nourrissait
Ainsi, plutôt que de nous freiner, le regard de l’autre nous nourrit.
Il nous nourrit de différentes manières, nous apprend à voir comment les autres peuvent réagir, ce qui fait souvent échos à notre propre manière de réagir.
Nous pouvons alors, par analogie, nous interroger sur notre propre regard sur les autres.
L’ouverture à la nouveauté et à la différence de l’autre nous amène également à l’ouverture à notre propre nouveauté et à notre propre différence.
Finalement, comment le fait de regarder les autres avec plus de bienveillance peut nous permettre d’avancer ?
Ainsi, le frein que je pensais, et que nous pensons généralement, venir du regard des autres venait plutôt du regard que je posais sur moi-même.
Partant de là, le développement de la bienveillance à l’égard des autres ne pouvait que contribuer au développement de la bienveillance à mon propre égard.
Reconnaître que chacun est libre de vivre et de s’exprimer comme il le souhaite nous permet également d’accepter que nous sommes, nous-mêmes, libres de vivre et de nous exprimer comme nous le souhaitons, et notamment grâce à la danse.
Et vous, quel est votre rapport au regard de l’autre ? Vous empêche-t-il de danser, de vous exprimer tel que vous êtes ? Ou, au contraire, vous permet-il d’avancer ?